Affichage des articles dont le libellé est premier roman. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est premier roman. Afficher tous les articles

dimanche 3 avril 2016

Si tu passes la rivière





Si tu passe la rivière
de Geneviève Damas

Editions Luce Wilquin - 2011




Geneviève Damas est une comédienne, metteur en scène et auteure belge née en 1970 .


Mon avis

Avec ce livre, on touche au Graal de l'émotion.
J'avais beaucoup aimé "Les trois lumières" de Claire Keegan pour son écriture fraîche et spontanée, mais je dois reconnaître que celle de Geneniève Damas m'a transcendée. 

Un assemblage de mots simples et justes confère à ce texte une retranscription fidèle de la pensée d'un jeune homme un peu "fada" avec ce qu'elle comporte de peine, d'interrogations, de peurs et de doutes. C'est la poésie du cœur que vous trouverez dans ce livre, celle qui n'est ni mièvre, ni emphatique, celle qui vous touche par ses accents de vérité, celle qui fait de la rusticité une vertu.

En plus de cette magnifique prose, chacun des protagonistes est rendu vivant et trouve sa place au cœur d'une intrigue forte et très bien menée. François, personnage central en mal d'amour est particulièrement bouleversant et l'approche faite par Geneviève Damas est saisissante.
Ne passez pas à côté de ce livre, c'est un premier roman, mais quel Roman !


Extrait du résumé de l'éditeur

François Sorrente est un jeune homme de dix-sept ans, le dernier d’une famille de cinq enfants. Élevé par sa sœur aînée, Maryse, à laquelle il voue un attachement sans borne, il vit dans la ferme familiale avec son père et deux de ses frères, Jules et Arthur. Il passe le plus clair de son temps à garder les cochons auxquels il parle et se confie.
..

Une page au hasard...


Un extrait

"Je ne sais pas si c'est la faute des livres, ce changement en moi, ou des lettres, ou des photos ou simplement de la visite de la vieille Lucie. C'est impossible de redevenir comme avant, même si je le voulais. Comme si je me mettais en tête de faire couler l'eau de la rivière dans l'autre sens, de la faire revenir dans sa source, ce serait sacrément fada, tu ne trouves pas ?"

dimanche 20 mars 2016

"Le second regard en art, est toujours superflu"



michael landy: saints alive



L'auteur

Jonathan Gibbs écrit régulièrement pour The Independent, The Daily Telegraph et The Times Literary Supplement. 
Randall est son premier roman.



Mon avis

Ce plongeon dans l'univers des "Young British Artists" a été pour moi une vraie découverte. Jonathan Gibbs nous offre avec une écriture fouillée et précise une belle opportunité de pénétrer dans le milieu marginal d'une époque très marquée par l'évolution de l'Art britannique.

J'imagine qu'un lecteur plus érudit appréciera davantage toutes les richesses culturelles et artistiques que contient ce livre, car, en ce qui me concerne, il m'a manqué le sésame pour en saisir l'intégralité... je pense être passée à côté de beaucoup de références.
Néophyte dans ce domaine, je me suis laissée guider, un peu à l'aveugle, par Vincent, personnage central de ce roman.
Nonobstant ce manque, j'ai apprécié l'histoire de Randall pour son texte vivant ponctué d'auto-questionnement, ses protagonistes atypiques et déjantés, son histoire d'amour, ses amitiés sincères qui apportent au récit toute l'intensité et l'originalité qui font de ce livre une oeuvre d'art !

Ce que j'ai apprécié également dans ce roman, c'est l’extraordinaire amitié de Vincent pour Randall, sa sagesse à toute épreuve, son bon sens et sa bienveillance pour tous. Il m'a semblé que l'auteur devait être un homme à son image pour l'avoir si bien mis en scène... Il émane de ce livre une impression de gentillesse et de sérénité malgré les extravagances et les incartades de l'artiste.

Merci aux éditions Buchet Chastel et à Babelio pour m'avoir permis de combler un peu mon ignorance, je ne regarderai plus les œuvres d'art avec le même œil à présent !
Damien Hirst

Résumé de l'éditeur


Que se serait-il passé si Damien Hirst n’avait jamais existé ? Si le jeune artiste britannique le plus célèbre et le plus influent des trente dernières années avait été quelqu’un d’autre ? Quelqu’un d’encore plus provocateur, plus scandaleux et de beaucoup, beaucoup plus drôle ?

C’est le scénario que met en scène Randall, formidable premier roman campé dans le Londres des années 1990, de la « Cool Britannia », et de l’émergence des « Young British Artists ».
Randall retrace la trajectoire de son héros éponyme – un subversif et génial artiste contemporain –, depuis son diplôme d’école d’art jusqu’aux somptueuses soirées financées par de richissimes banquiers de la City. L’intrigue se noue autour de la découverte, par la veuve et le meilleur ami de Randall, des années après sa mort, d’une cache de dessins et peintures pornographiques qui compromettent l’ensemble des acteurs du monde de l’art et de la finance de l’époque. Que faire de ces brûlots estimés à des millions de dollars et qui révolutionneront sans aucun doute l’histoire de l’art contemporain ?
Intrigant portrait d’artistes en devenir, histoire d’amour et d’amitié s’il en est,Randall propose une plongée dans un moment clé de l’histoire de l’art et relate avec humour et cruauté la folie financière contemporaine et l’explosion d’une société où ne fait plus sens que ce qui s’achète, et s’achète cher.

Damien Hirst

One of the Chapman Brothers' less disturbing creations

Quelques extraits

"Tout personne persuadée que l'art est une question de savoir-faire, ou de beauté, était l'esclave d'idées dépassées."

"Voilà, s'il en fallait une, ma définition de l'amitié. Si le fait de côtoyer quelqu'un ne fait pas de vous une autre personne, alors ce n'est pas un ami, c'est une relation."

"Le danger du succès, c'est d'échouer à grandir en proportion, comme artiste. Il faut devenir meilleur à mesure qu'on devient célèbre."

" Ne pas interroger le tableau, mais attendre qu'il se révèle. Lui donner le temps de démentir sa première impression, de balbutier et brouiller son récit. Le fixer du regard jusqu'à ce que le tableau cède."

samedi 18 juillet 2015

Une fille !

 

"Journal d'une accoucheuse"
de
Priyamvada N. PURUSHOTHAM

L'auteure 
Après des études de lettres, Priyamyada N. purushottam devient actrice de théâtre, puis enseignante de français à l'Alliance française de Madras. C'est par la poésie qu'elle aborde l'écrirure littéraire. Purple Line a été finaliste du Bhatt First Book Award 2012, récompensant un premier roman indien. Elle vit actuellement à Boston.





Mon avis

Quelle belle découverte ce roman qui se lit un peu comme un journal ou un docu-fiction, car il contient de nombreux détails de la vie quotidienne des indiens et leurs habitudes culinaires, mais aussi sur les nombreuses religions présentes en Inde. 
A l'instar de Simone de Beauvoir et de Jean-Paul Sartre, Mrinalini, jeune femme gynécologue, entretien une relation épisodique et libre avec Sid dans un pays où la femme est très loin d'être l'égale de l'homme et  au sein duquel les bébés de sexe féminin ne sont pas souvent les bienvenus. Passionnée par son métier qu'elle conçoit bien au-delà de la pratique de simples actes médicaux, Mrinalini s'intéresse de près à la vie de ses patientes qui sont pour bon nombre d'entre elles, prisonnières d'un mari, d'une religion, d'une belle-mère acariâtre ou d'une burqa... 
J'ai beaucoup aimé l'écriture de cette jeune romancière, que j'ai pourtant trouvée parfois un peu inégale. Son récit est limpide, son implication et son émotion palpables. Un livre à découvrir !


Extrait de la 4ème de couverture

 Jusqu’à ce cours de sciences naturelles où il lui a fallu disséquer une grenouille, Mrinalini avait décidé de devenir actrice, mais cette expérience a suscité en elle une tout autre vocation : elle sera médecin et mettra des enfants au monde.
Après des années d’études à Delhi puis en Angleterre, Mrinalini retourne à Madras afin d’y ouvrir une clinique de gynécologie. C’est à travers son récit que le lecteur fait connaissance avec six de ses patientes aux origines, âges et aspirations différents.
De l’infanticide des filles au viol, ou à l’avortement, c’est sous le signe de la sensibilité mais non sans humour que ce premier roman se confronte, avec une fraîcheur de ton inédite, aux graves questions de société qui affligent en profondeur l’Inde contemporaine.


Quelques extraits 

"On frappe à la porte, la première patiente vient d'arriver. D'autres suivent, et puis d'autres, telles des fourmis dans un pot de miel. Elles écartent les jambes et m'adressent un regard d'espoir ; j'aimerais, ô combien j'aimerais pouvoir leur donner des ailes"

"A l'âge de quinze ans, je serais mariée à un marchand qui en aurait trente. Je porterais ses enfants. Nous habiterions dans un deux-pièces avec sa mère et ses frères. Je serais la main qui fait se balancer le berceau, le sein qui nourrit les enfants et le vagin qui rend tout possible. 
Je ne serais rien du tout."

"Aristote a écrit que la femelle est femelle en vertu d'un certain manque de qualités et que nous devrions considérer le sexe féminin comme affligé d'un défaut par nature. Il pensait également que la terre était immobile et au centre de l'univers"

"En regardant ce corps juvénile immobile sur lequel opéraient mes mains gantées, j'eus la sensation que je lui enlevais sa féminité, que je lui volais ses entrailles avant même qu'elle ait fait l'amour pour la première fois. Mais je me rends compte maintenant que j'avais tort ; tout lui retirer ne l'empêcherait pas d'être femme, une femme vivante et pensante, car ce que nous sommes se trouve à l'intérieur de notre tête et non de notre corps."   

dimanche 7 juin 2015

Life list...



"Demain est un autre jour"
de Lori Nelson Spielman



La romancière


Lori Nelson Spielman est américaine et vit dans le Michigan. Elle exerce le métier d'enseignante. "Demain est un autre jour" (Life list) est son premier roman.

Après le succès de ce premier roman vendu à plus de 250 000 exemplaires, elle vient de publier le second "Un doux pardon", dont les premières critiques confirment le talent de l'écrivaine et l'engouement de ses lecteurs.





4ème de couverture

A la mort de sa mère, Brette Bohlinger pense qu'elle va hériter de l'empire cosmétique familial.
Mais, à sa grande surprise, elle ne reçoit qu'un vieux papier jauni et chiffonné : la liste des choses qu'elle valait vivre, rédigée lorsqu'elle avait 14 ans. Pour toucher sa part d'héritage, elle aura un an pour réaliser tous les objectifs de cette life list... Mais Brett d'aujourd'hui n'a plus rien à voir avec la jeune fille de l'époque, et ses rêve d'adulte sont bien différents.
Enseigner ? Elle n'a aucune envie d'abandonner son salaire confortable pour batailler avec des enfants rebelles. Un bébé ? Cela fait longtemps qu'elle y a renoncé, et de toute façon Andrew, son petit ami avocat, n'en veut pas. Entamer une vraie relation avec un père trop distant ? les circonstances ne s'y prêtent guère. Tomber amoureuse ? C'est déjà fait, grâce à Andrew, à moins que...

L'histoire commence....



Mon avis


Ce livre m'a beaucoup étonné. Je ne m'attendais pas, pour un premier roman, à une écriture aussi juste, précise et émouvante.
L'histoire commence avec le décès d'une maman... Une maman très proche de sa fille, une maman affectueuse, toujours présente jusqu'au jour où la maladie l'emporte. (et oui, on commence fort côté émotion...)

Même si l'histoire est souvent prévisible et que c'est un peu "cousu de fil blanc" on se laisse bien vite prendre au jeu. J'ai trouvé que Lori Nelson traduisait très bien la relation intense et intime entre la mère et la fille.
C'est plutôt un roman féminin, tendre et divertissant, plein de délicatesse, de bons sentiments et de larmes aussi...
Un livre facile donc, mais qui mérite certainement d'être lu.
Je viens d'acheter le second "Un doux pardon". C'est une preuve de qualité ça non ??


Quelques extraits


"Tu sais, j'attends que tu me parles d'un amour véritable, celui qui interrompt les battements de ton cœur, un amour pour lequel tu serais prête à mourir."

"L’amour est imprévisible. Si on pouvait choisir la personne dont on tomberait amoureux, tu crois que j’aurais choisi une femme qui vit à plus de trois mille kilomètres de chez moi ?"

"En tant que mères, notre tâche n’est pas d’élever des enfants, mais d’élever des adultes."

"Comme chaque personne saine d'esprit, vous êtes en quête d'une relation dans laquelle vous vous sentez protégée, grandie et aimée. Vous vous attendiez à ce que votre père subvienne à ces besoins. Et il le fera peut-être. Mais ces besoins peuvent être comblés par d'autres moyens."

jeudi 28 mai 2015

Le Major et l'épicière

La dernière conquête du Major Pettigrew
d'Helen Simonson



La romancière, Helen Simonson...


Née en Angleterre, Helen Simonson vit aujourd'hui à New York. Elle a passé son enfance dans l'East Sussex, ce "pays littéraire" où vécurent notamment Henry James, Rudyard Kipling et Virginia Woolf, et dans lequel elle puise encore une grande partie de son inspiration. 
Helen Simonson est diplômée de la célèbre L.S.E. (London School of Economics)
Phénomène de librairie en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, où il est resté plusieurs semaines en tête des listes des meilleures ventes, la Dernière Conquête du major Pettigrew est son premier roman. (Editions NiL - 2012)




Ce qu'en dit la 4ème de couverture...

A Edgecombe Saint Mary, une tasse de thé délicatement infusé est un rituel auquel, à l'heure dite, le major Ernest Pettigrew ne saurait déroger. Désormais veuf, ce parfait gentleman retraité du Royal Sussex a pour seule compagnie ses livres, ses chers Kipling, et quelques amis du club de golf - tous occupés à fuir leurs dames patronnesses. Et ce n'est guère son fils, dévoré par l'ambition et les jeux de pouvoir de la City, qui saurait être le complice de ses vieux jours.
Quand l'amour se présente soudain à lui sous les traits de la douce Madame Ali - l'épicière d'origine pakistanaise et de confession musulmane -, la communauté villageoise s'émeut, l'équilibre familial vacille. Le major, si respectueux des traditions, saura-t-il mener sa dernière conquête contre les convenances, la vox populi et... lui-même ?

Mon avis...

Un livre qui se lit tout doucement, parce qu'il est délicat et qu'il fourmille de petites phrases aux accents "British".
Je mentirais si je disais que j'ai adoré ce livre, cependant j'y ai trouvé beaucoup de finesse et de sensibilité. 
Un brin émouvante, légèrement désuète,  cette histoire d'amour entre un retraité et une épicière pakistanaise peut séduire les "lover of " romans britanniques...

Le début de la romance...



Quelques extraits ?

"- De nos jours, les hommes attendent de leur femme qu'elle soit aussi époustouflante que leur maîtresse.
- C'est atroce. Comment donc les distingueront-ils l'une de l'autre ?"

"Il avait oublié que le chagrin ne décline pas en ligne droite ou suivant une courbe lente, comme un graphique dans le livre de mathématiques d'un enfant.
Au lieu de quoi, tout se passait comme si son corps renfermait un monceau de détritus de jardin, avec de lourdes mottes de terre et des buissons aux épines acérées qui le piquaient au moment où il s'y attendait le moins."

"Pas de religion, pas de politique, le sexe seulement à travers des allusions... pas étonnant que vous, les Britanniques, soyez obsédés par la météo, mon chéri"

mercredi 11 février 2015

Masse critique Babelio - février 2015




"Trois langues dans ma bouche"
de Frédéric ARIBIT
L'auteur

Frédéric Aribit est né en 1972 à Bayonne. Il partage son temps entre Itxassou et Paris. Après un doctorat de lettres, il a publié un essai, André Breton, Georges Bataille. Le vif du sujet (L'écarlate, 2012), et collabore notamment à La Cause littéraire, où il signe de nombreux articles. Il est également bassiste. Trois langues dans ma bouche est son premier roman..



4ème de couverture


Il croyait l'avoir perdue à jamais : sa langue maternelle se réveille. Agitée par les coups du hasard, elle secoue le Basque qui sommeille en lui et le propulse dans les vies minuscules de son enfance. Alors il n'a plus le choix. Cette langue devenue étrangère, il la tourne mille fois dans sa bouche. Et elle met son corps à l'épreuve d'un long baiser qui embrasse avec une même fougue les livres qu'il lit, les gens qu'il aime et ceux qui meurent, broyés parfois dans les mâchoires des revendications politiques.

Furieusement poétique, Trois langues dans ma bouche est l'aventure saisissante d'un homme en quête d'identité, avec le basque aux trousses et l'écriture pour horizon.




Mon avis
Ce premier roman de Frédéric Arabit me laisse perplexe et pas réellement convaincue car je ne l'ai pas vécu comme un "roman", mais plutôt comme un essai, une introspection de l'auteur, une recherche, une quête de vérité ou d'identité comme évoquée par l'éditeur en 4ème de couverture. 
Son écriture est certes remarquable et empreinte de poésie, mais aussi chargée d'ironie parfois sexiste ou un peu morbide...
J'ai aimé le rythme du récit autant que les références musicales et vestimentaires qui ont marqué les années 70 et 80 et dont l'auteur use pour enrichir la narration de ses exploits et découvertes de jeunesse. 
La langue sous toutes ses formes est bien évidemment au cœur de ce livre car il nous la sert aussi bien en vinaigrette, qu'enroulée autour de la sienne ou encore chargée d'un dialecte du pays basque.
Un regard politique sur l'identité des territoires et plus particulièrement sur les indépendantistes, les manifs et les dégâts collatéraux, quelques références aux illustres écrivains qui ont  guidé les pas de l'auteur vers la littérature, des souvenirs d'enfance, des liens familiaux qui s'éteignent et une langue qui tourne sept fois dans la bouche avant de raconter... voici ce que contient ce premier roman.

J'employais au début de ce billet le mot "perplexe" parce que j'ai aimé ce livre et pourtant quelque chose m'a manqué. De l'émotion peut-être ? Je ne me suis pas du tout attachée au personnage principal, qui m'est apparu comme "imperméable" et distant. Je me suis régalée dans la première partie du livre parce que j'ai aimé l'humour et l'écriture de l'auteur et que ses souvenirs de jeunesse correspondaient aux miens. En revanche les cinquante dernières pages m'ont semblé un peu longues et je dois avouer que je me suis ennuyée et perdue dans son débat intérieur.
Voici donc mon avis très mitigé sur ce livre à la verve irréprochable, riche de vocabulaire, de références culturelles, historiques et linguistiques, mais pauvre en émotions en ce qui me concerne ! 


Quelques extraits
"Tu sais ce que c'est ça ? fit-il pour me calmer. Tu te rends compte de ce que tu as devant les yeux, là ? Ce sont les deux plus anciennes lignes de basque jamais retrouvées. Ça s'appelle les Glosas Emilanenses,  ce sont les commentaires d'un vieux livre latin du Xe ou XIe siècle, on a retrouvé ça dans les marges du texte, sans doute écrit par un moine copiste du monastère de San Millan de la Cogolla, dans la Rioja. Deux petites lignes, imagine, deux foutues petites lignes sur un millier de gloses en latin, tu te rends compte ?"

"Une légende basque raconte qu'afin de soumettre les hommes et les femmes de ce pays à la tentation, le diable essaya pendant plus de mille ans d'apprendre l'euskara. N'y parvenant pas, il dut finalement renoncer à envoyer les Basques en enfer.
Je me demande inversement si Dieu, lui, parle le basque. Malgré l'ahurissant renouveau de cette langue en péril dans les années 60 et qui compte aujourd'hui plus d'un million de locuteurs, dont près de 60 000 en Pays basque français, je n'en suis pas certain."

"Les imbrications corporelles devinrent soudain plus complexes. Nous innovions sans cesse, inventant des positions que je ne savais pas physiquement possibles l'instant d'avant, et vas-y que jet te mets mon bras là, et vas-y que tu lui mets ta jambe ici, et alors que nos innocentes conversations suivaient leur petit bonhomme de chemin, parcourant de A-ha jusqu'à ZZ Top tout l'alphabet discographique du moment, nos souffles s'accéléraient si bien que de consentements tacites en chaleurs inconnues, l'air se raréfiait autour de nous, en autant de touch-and-go qui s'ajournaient d'eux-mêmes."

"L'une était blonde, plus arrondie déjà, plus formée que l'autre, la brune autrement plus gouailleuse et qui l'éclipsait en beauté. Mais ce qui fascinait surtout chez ces diablesses acoquinées comme pour vous perdre était cette légère claudication dont souffrait la première, la sœur du petit Benat, parce qu'elle avait une jambe plus courte que l'autre."

"Et puis il y avait cette histoire de jambe, une seule, qu'on n'avait jamais retrouvée. Déchirée sous la force de l'impact, projetée quelque part dans les airs et atterrissant dans le noir alentour, dans un fourré où elle avait lentement pourri, ou dans la gueule d'un chiens moins regardant dont elle avait fait le régal, comme ce morceau de sa propre côte qu'après un pneumothorax, Roland Barthes avoue avoir longtemps conservé dans un tiroir, relique de lui-même, avant de se résigner à le jeter aux clébards du haut de son balcon. On avait enterré un corps unijambiste."